MP 1point2 : « Paris, c’est une étape de plus, on ne sait pas quelle sera la prochaine. »

Juste avant leur concert au Théâtre des Mazades, on a rencontré Riot et Favo, la moitié d’ MP 1point2. Leur premier album « Les 400 coups », le remix de cet album, leur passage à 3 sur scène et leur première date parisienne : on a fait le tour de l’actu de ce groupe de hip hop groove qui monte et franchit les étapes une à une depuis plus de 10 ans.

MP 1point2, c’est un groupe toulousain, d’origine aveyronnaise. Pour ceux qui ne vous connaissent pas, est-ce que vous pouvez présenter le projet ?

Favo : La genèse d’MP ? MP pour matière première, 1point2 (1.2) une petite dédicace à l’Aveyron puisque trois d’entre nous sommes aveyronnais. On est quatre : M.M et moi-même en MC, Le Z et Riot aux machines. MP c’est une histoire de potes avant tout, avec le Z, on est copains de maternelle ! On a fait du son ensemble quand on était jeunes, on a rencontré M.M et sa vibe chanson, poésie, lyrique. Et à Toulouse , on a rencontré beaucoup de monde dont Riot, beatmaker, qui faisait des instrus avec des samples de botch ! MP c’était un peu un collectif au début et puis en allant vers une aspiration à en faire un métier, on s’est retrouvé à 4, pour faire vivre le projet sur scène, car MP c’est avant tout une histoire de scène et de partage avec les gens.

Ce qui est marquant dans votre évolution, c’est le travail du texte, on sent que c’est plus mature…

Favo : Petit à petit, on arrive de mieux en mieux à synthétiser nos idées et à arriver plus rapidement au sujet, de mieux à mieux à écrire les sujets ensemble aussi. Au début quand on écrivait à 2 avec M.M, on se rendait compte que sur des morceaux on ne parlait pas forcément de la même chose.

Sur Madame 5 en tout cas, vous parlez bien de la même chose ! 

Favo : (rires) Et encore si t’écoutes bien le morceau, M.M parle plus de la fille qui te fait une branlette alors que moi c’est « je me branle » en fait. Donc voilà c’était des petites subtilités, il faut aller loin pour le comprendre. Les années nous ont permis d’aller au fond du truc… Pour Madame 5, ça passe bien cette phrase (rires).

Riot : D’un point de vue plus extérieur sur les textes, tu parles de maturité je suis d’accord, mais c’est aussi de la simplicité. C’est plus facile, on comprend plus facilement où on veut en venir. C’est parce qu’ils réfléchissent pour trouver le bon mot et faire passer l’idée qu’ils ont derrière. Et musicalement c’est pareil ! Des fois t’en mets trop, derrière faut réussir à élaguer, à garder l’essentiel, et c’est ce qu’on arrive à faire maintenant ensemble ! Y’a 10 ans chacun faisait son truc et on mettait en commun, ensuite on a eu l’envie de regarder ce que faisait l’autre, maintenant on fait les mêmes choses, on va dans le même sens, ça évolue.

Favo : Je me faisais la réflexion récemment, j’écris depuis que j’ai 16 ans…

Pas depuis la maternelle ?

Favo : Si j’avais fait un morceau à 5 ans, ça faisait « un jour un petit CAILLOU, avait perdu sa MAMAN, et alors il est TOMBÉ, et alors il a PLEURÉ, tananan ».

Riot : Elle est pas mal hein !

Favo : Ouais elle est bien…

Riot : Bah d’ailleurs on va la remixer (rires).

Favo : Ce que je voulais dire, c’est que je suis arrivé tard dans l’écriture, je n’ai pas un environnement qui m’a emmené vers la création. Le processus de comprendre comment exprimer une envie de création, ça met du temps à devenir mûr, au début c’était sans limites. Pour MP maintenant je peux faire une chanson avec un thème, une profondeur, une envie, une dimension en fait.

On parle de votre évolution, qui se concrétise par ce premier album, « Les 400 coups ».

10616336_616675165115707_8376352152842926072_nRiot : Au fond, pour moi, c’est la suite, mais ça va dans la même démarche : faire les choses de mieux en mieux et vouloir être de plus en plus précis. En soit, oui c’est une autre étape, plus de titres, une démarche plus cohérente que nos premiers EP, qui d’ailleurs nous paraissaient cohérents à l’époque, mais ça partait dans tous les sens. Et c’est aussi ça la force d’MP, c’est qu’on ne veut pas se limiter à un seul type de musique. Cet album on avait envie qu’il nous ressemble. Y’a plusieurs ambiances. Ce n’est pas un aboutissement mais une pierre de plus. Le prochain projet sur lequel on travaille, ce sera un EP.

Favo : Ça sera pour début 2016, un complément à l’album « Les 400 coups ». Je trouve que ce CD nous a mis dans la dimension de faire un album… Nous on est toujours en train de créer, constamment. Faire un album, c’était difficile, mais derrière on va aller plus loin !

Ce que tu me dis me fait penser à ce que me racontait Julien du KKC lors de notre interview : il m’avait dit avoir eu peur de sortir un album, car ça figeait leur musique à un moment donné.

Riot : Je trouve ça intéressant aussi d’avoir un produit qui te permette de dire « c’est ça, et la ligne est claire » même si les ambiances sont différentes. C’est un hip hop groove qui emprunte à différents styles. On parlait de maturité, oui, c’est une étape supplémentaire, on a su, comme sur les textes et instrus, faire un tri et sortir ce qu’on voulait proposer !

Favo : Quand on a sorti les EP, c’était 5 ou 6 titres et on en avait une dizaine. Là pour 11 titres on avait 30 morceaux ! Ça ne nous a pas fait peur car on avait une masse de morceaux qui nous permettait, pour nous, de faire les bons choix.

Cet album, vous l’avez prêté aux copains, avec « Joue avec Les 400 coups » qui vient de sortir où plusieurs groupent revisitent vos productions. Quand tu crées et que tu prêtes ton jouet, dans quel état d’esprit tu es : t’es content de ce qu’Antibiotik a fait de ton son ou tu te dis «Aaaah Aurél du KKC il a vu ça dans ce morceau j’y avais pas pensé » ?

Favo : C’est une super question ! Je crois que sur ça avec Riot on se rejoint beaucoup, on a aucun frein à partager ce qu’on crée. En fait, au fond, on crée pour que ce soit réinterprété et partagé, donc on était halluciné par certains morceaux ! D’ailleurs, t’as parlé de la reprise de Yellow d’En Marche sur Opus, qui nous a apporté une vision qu’on n’aurait jamais faite. J’adore ça, avoir la vision d’autres artistes sur ce qu’on peut proposer.

Riot : Quand tu partages, comme disait Favo, finalement tu ne perds rien ! Au pire des pires, c’est jamais le cas finalement, ça t’impacte pas… Au mieux, ça te permet de multiplier la force de ta proposition !

Favo : Le remix du KKC on le joue sur scène par exemple.

Riot : Ouais, Aurèl nous a fait un remix, il était cool, on lui a dit qu’on voulait le faire en live et il était ok. Partager c’est que du positif !

Favo : On parlait de Yellow, mais y’a aussi des grosses surprises, le remix de Grant Lazlo qui est passé sur Chill Masters et qui est à 80 000 vues. 80 000 Vues ! Putain quoi ! Je m’ouvre à quelqu’un et je reçois ça ? C’est génial !

Plus de monde que la population de l’Aveyron (rires) !

Favo : Voilà !!! (rires)

Tu parlais de Yellow, vous êtes très proches, vous faites quand un projet ensemble ?

Favo : Avec MP, c’est pas interdit, on lui a envoyé un morceau puisqu’il voulait voir l’instru et amener sa touche. Lui et moi, on monte un projet qui s’appelle Chips. Yellow c’est un mec qui a un super esprit, un super zikos, on partage beaucoup de choses, je lui ai écrit des bouts de chansons, il a composé aussi pour nous. Avec Riot je crois qu’ils ne se sont jamais rencontrés, mais ça marchera très bien ! Après il faut laisser le temps pour que les projets émergent par eux-mêmes, on est proches de par Bajo El Mar mais je le connaissais déjà et on travaillait de loin ensemble, là on se rapproche avec Chips. Son remix sur MP c’est un pas… On a un morceau qui s’appelle Pas de petits pas et dans la vie y’a pas de petits pas… Fais un petit pas vers l’autre et emprunte un chemin qui promet de beaux lendemains.

Bajo El Mar, vous bossez aussi avec MathPromo. Comment vous vous êtes rencontrés et quelle est l’importance de ces structures pour vous aujourd’hui ?

Riot : Bajo El Mar s’occupe de tout ce qui n’est pas artistique, pour le groupe et aussi nos projets perso. Mathieu fait le booking chez eux et il nous trouve beaucoup de dates. Y’a aussi une part de conseil et de management qui est bienvenue et qui nous permet de prendre du recul. Des fois quand t’as la tête dans le guidon c’est un peu compliqué. On a ensuite fait des choix de développement, artistiques et de production, qui nous ont fait rencontrer MathPromo, pour nous développer davantage. Ce sont deux structures qui croient en notre projet, qui nous donnent des billes pour avancer. On parlait de dons, là on reçoit ! Du coup tu donnes davantage, eux le ressentent, y’a une émulsion qui se crée et tout le monde va dans le même sens : développer sa structure et ce projet qui sert tout ça en fin de compte !

Votre développement, c’est aussi une belle actu : votre première date parisienne…

10802052_688318461284710_849965884177059150_nRiot : Là, on est super content ! Jeudi on monte à Orléans, et vendredi La Bellevilloise à Paris (le 9 octobre), c’est des étapes qui comptent dans la vie d’un groupe, c’est marquant ! Ce sont des étapes qui te font te dire « je suis sur la bonne route, continue, fais confiance au groupe et aux gens qui te soutiennent ».

Favo : Tu vois avec MathPromo par exemple, dans le deal de départ, le partenariat est fini. Mais ils nous avaient dit « si vous allez à Paris, on sera là ». Et les gars sont là ! Ça fait partie des choses qui comptent ! Ça donne de l’envie, du baume au cœur pour aller jouer le son d’MP 1point2 à Paname quoi ! Je suis comme un fou. On l’a jamais fait, ça me fait trop plaisir, c’est important pour nous, pour la planète (rires).

Riot : Mais c’est toujours une étape, on ne sait pas quelle sera la prochaine mais on veut les franchir. Celle-ci est une étape, un peu comme la fête de la musique sur la Place du Capitole, quand tu commences, tu te dis «ouaiiiiiiiis j’aimerais bien faire une date sur le Capitole ». L’objectif final, je ne sais pas lequel il est mais on va continuer d’avancer, avec des équipes qui croient en nous.

Favo : Un objectif qu’on avait et qu’on est en train de concrétiser c’est de vivre de la musique et devenir intermittents. Les étapes s’enchaine les unes aux autres.

On en arrive aux questions rituelles : comment se passe votre festival idéal, où vous jouez et avec qui ?

Favo : En rase campagne, dans un champ avec un gros système de son en mode sound system. J’invite Ackboo, Yellow, Scarecrow et le KKC. Le lendemain, j’invite I AM mais pas pour qu’ils chantent juste pour les voir (rires), Oxmo Pucinno car j’aimerais lui taper la bise mais pour qu’il chante aussi, peut-être un gros truc de techno derrière pour se finir chanmé !

Riot : Moi mon festival va coûter plus cher je te le dis direct (rires). Idéalement, j’aimerais un truc avec des prog’ Snoop et Dr Dre, Bob Marley qu’on exhume, que tout le monde s’y retrouve ! Et j’invite tous les gens dont Favo a parlé pour qu’ils partagent le moment avec nous, avec ma mère, ma femme et des amis !

Et pour finir, Opus est un webzine de découvertes musicales : vous avez des artistes à nous suggérer ?

Riot : Je pense que tu les connais, ceux qu’a évoqués Favo comme le KKC qui sont des gars géniaux, Scarecrow aussi… Après je peux te dire qu’en ce moment j’écoute Kendrick Lamar mais je fais rien découvrir à tout le monde !

Favo : Moi Vald m’a puissamment retourné le cerveau. J’aimerais te faire découvrir Le Substitut, un jeune groupe de Foix. Et puis tous les jeunes que j’accompagne avec Cédric Rodrigues dans le cadre d’un atelier avec le FAJIP de Foix et ils ont fait des supers morceaux ! Et sinon, on découvre rien car on se fait tout présenter, tout se qui passe j’écoute, j’approfondis souvent pas assez !

Riot : J’ai envie de te dire que c’est à toi de nous faire découvrir des trucs (rires)

Et bien j’ai une adresse pour toi, www.opus-musiques.fr (rires)

Favo : Mais c’est vrai en plus !

Merci à vous, bon concert, bonne date parisienne et on continue de vous suivre !

Favo : Merci à toi !

Rémy

Créateur d’Opus, Rémy est à la fois rédacteur et photographe dans notre media. Un mélomane qui écoute aussi bien du rock que du rap ou de la pop, et qui aime fouiller la scène locale.
C’est également lui qui gère le projet Focus d'Opus