Chouf : « L’indépendance permet de produire au moment où l’artistique est prêt »
Juste avant son concert aux auditions régionales des Inouïs, on a rencontré Chouf. Porte-parole de la scène chanson toulousaine, on a décortiqué son actu et la sortie de son dernier album, Volatils, qu’on découvrait en concert pour la première fois. Une belle rencontre avec un musicien, chanteur et parolier, qu’on vous conseille très vivement d’aller voir sur scène !
Bonjour Chouf ! On te retrouve aujourd’hui à Albi, pour les Inouïs du Printemps de Bourges : ça annonce une belle année pour toi non ?
C’est ce que j’espère ! Pour l’instant il y a un premier semestre 2016 qui est plutôt soutenu. La principale évolution c’est qu’on a eu des conditions parfaites pour créer le spectacle, en résidence au Bolegason, sur 2 périodes en janvier et en avril. Ça nous permet, dès les premières dates, de proposer une création scénique et musicale.
Tu dis « on » et c’est important ! Le projet s’appelle Chouf mais c’est une vraie équipe derrière.
Exactement ! C’est un projet que je défends et porte en mon nom. Après effectivement sur scène on défend ça en groupe. J’ai une équipe jusqu’en technique, sonorisation et lumières-vidéos. On défend les propos des textes en équipe même si je le porte en tant que Chouf. Ce dont j’ai envie, c’est qu’on ressente une énergie de groupe.
Tu as parlé de vidéo c’est une nouveauté avec Volatils donc ?
Sur ce spectacle on a intégré un peu de mapping et de la vidéo, c’est effectivement une des nouveautés de cette tournée. C’est les prémices pour nous mais ça nous amène une dynamique qu’on sent sur scène. C’est un domaine riche en exploration je crois.
Une belle année pour toi, rythmée par la sortie de ton nouvel album, Volatils. Comment tu le qualifies par rapport à tes précédentes prod’ ?
J’espère même qu’il nous portera un peu plus longtemps que 2016 ! Au niveau du son c’est beaucoup plus produit, on a fait ça dans un plus gros studio, avec Manu Cabrol au Studio La Face B. Un son plus produit, moins brut, avec l’apport d’un réalisateur et directeur artistique qui est Dimoné. Au niveau musical c’est toujours autour d’une base plutôt rock, avec une intégration de cuivres en contrepoints, mais les guitares et claviers sont beaucoup plus exploités que sur les précédentes productions.
Pour moi une des évolutions forte c’est le texte et l’écriture : il y avait un parti pris de départ d’être moins dans la narration, pour avoir un parler plus direct avec l’auditeur, qu’il rentre plus vite dans les propos de la chanson. Sur l’Hôtel des Fous, on créait des histoires sous forme de contes, avec un propos sociétal en deuxième sens que tous les gens ne comprenaient pas forcément. Au départ ça ne me dérangeait pas mais à la longue je trouvais ça un peu dommage, si je voulais parler de tel sujet c’était dommage que les gens n’en perçoivent pas la portée. Sur Volatils j’ai essayé de garder ces doubles interprétations mais en explicitant un peu plus directement le sens sous-jacent des chansons.
On a découvert cette semaine le clip de Ca va Péter où on ressent très clairement cette volonté d’expliciter le texte. Un morceau plus énergique ! C’est aussi la lignée de Volatils ?
Tu as raison. Ce morceau-là, c’est pas l’OVNI de l’album, mais musicalement c’est un condensé d’une énergie rock alternatif qui m’a longtemps bercé et que j’aime toujours. En terme de texte, j’essaye sur Ca va Péter de travailler les images, le texte, la plume, mais je veux qu’on comprenne directement où je veux en venir !
Un album pour lequel t’as fait appel au financement participatif. D’ailleurs, j’ai bien aimé ta démarche d’expliquer idéologiquement et artistiquement POURQUOI tu faisais appel à ce financement, avec un descriptif clair de ce que coûte chaque étape. Avec la volonté de rester indépendant surtout ?
Si demain un label avec une vision des choses concordante vient me voir je saurai l’écouter ! Mais artistiquement j’avais un album sur le feu, j’avais pas envie de me plier aux délais et plannings de quelqu’un d’autre. Avec un label on aurait repoussé ça de 6 mois à 1 an, alors ça aurait peut-être eu plus d’impact mais on aurait fait quoi à part attendre ? L’indépendance permet ça, de produire au moment où l’artistique est prêt. C’était plus cohérent pour nous, ça me permet aussi de créer des échéances, j’ai besoin de ça pour créer, écrire des nouvelles chansons. Et pour moi, surtout, un album c’est prétexte à la scène !
Pour ce qui est du financement en souscription, ça a contribué à 1 quart des dépenses totales. Ce sont des productions où tout le monde met du sien : au prix du marché c’est un album qui aurait couté 4 fois plus ! Si j’avais 4 fois plus d’argent je le ferais avec plaisir. Là, tout le monde s’investit physiquement et financièrement dans le projet, au niveau des visuels, des vidéos, des musiciens… J’ai un peu la double casquette de gestionnaire du projet et de directeur artistique, même si au fur et à mesure des créations on se structure de plus en plus, qui c’est si ça ne va pas devenir un vrai label ? C’est quelque chose qui me branche, de trouver des nouveaux chemins de coopération, là on arrive au bout du financement participatif tel qu’il est mis en place.
Y’a 10 ans de ça, le public qui souscrivait avait un intérêt à participer. Peu à peu, ces sites on fait en sorte que le public débourse plus que ce qu’il débourserait en achetant l’album à la sortie du concert. Là on va droit dans le mur, et tu as de plus en plus de projets qui font appel à ces financements, à un moment donné on ne peut pas donner partout, tout le temps, avoir l’info tout le temps. On arrive au bout, d’autant que tu vois des groupes qui font appel à ça tous les ans, tu peux pas mobiliser l’énergie du public tout le temps.
Tu parles d’investissement, tu fais partie d’un joli collectif : Les Fils de ta Mère avec du beau monde. Je dois te remercier car suite à un de vos concerts j’ai vraiment eu envie de fouiller du côté de Monsieur Brassens que tu m’as fait découvrir différemment. Comment c’est né et quels sont vos objectifs s’il y en a avec cette belle bande ?
A la base c’est lié à la création de Chez Ta Mère au printemps 2012 si mes souvenirs sont bons. Ils nous ont réunis pour une fête d’ouverture, c’était très spontané, le public était bien présent. Et on s’est dit qu’à Toulouse y’a plein de rendez-vous funk, reggae, jazz, et pourquoi pas en chanson ? On en a parlé au gars de Chez ta Mère, ça l’a séduit. On est parti sur un collectif, sans savoir où ça allait, avec Flo des Pauvres Martins, Manu Galure nous a rejoint. L’idée c’était aussi de faire venir un public qui ne venait pas sur nos propres spectacles : quand tu fais des concerts de reprises, ça touche plus de gens malheureusement peut-être, la curiosité ne dépasse pas ces frontières-là c’est un peu dommage.
Au départ donc c’est juste une idée jetée sur le tas, là on en est à la 4e saison. Mais pas vraiment d’ambitions, le public peut se lasser peut-être aussi de la formule, on a peut-être épuisé nos thématiques. Et puis on a moins le droit à l’erreur aujourd’hui ! Le public est habitué, on a fait une vingtaine de spectacles, on passe 3 jours à apprendre 20 chansons, c’est de l’énergie, si on rate un spectacle les gens vont se rappeler de celui-là !
On en arrive aux questions rituelles : demain tu as les clés de ton festival idéal, ça se passe où et avec qui ?
(rires) Un festival idéal ? Je suis toulousain donc ça se passe à Toulouse, dans la ville parce qu’on est en train de perdre l’essence même du mélange des genres et des gens. Créer un festival intramuros, avec des scènes où se mélangent les genres musicaux, les horizons de personnes, c’est l’utopie absolue ! Des scènes dans les rues mais pas une fête de la musique, des scènes où on bloque les rues, on rend Toulouse piéton, on transforme ça en fête populaire de quartier, les gens sont à l’apéro ! Pour la programmation, très éclectique, des trucs pour les gamins, des trucs qui font danser, pas des trucs élitistes ! En groupes t’invites les copains, les groupes que t’admires qui peuvent adhérer à ce genre d’idéal et vivez jeunesse !
Et pour finir si tu avais 2, 3 groupes à nous faire découvrir ?
Alors… J’aurais tendance à citer des groupes de mes musiciens : Acropolis Bye Bye, du rock grecque progressif. Y’aurait aussi Some. Et après, un truc de chansons quand même… Tiens Dimoné qui a dirigé l’album ! Du copinage mais il faut.
Merci à toi et on en profite pour annoncer ton concert au Metronum pour Détour de Chants le 5 février !
Rémy