Dans la peau de Sarrazy Rochelle
Le toulousain Laurent Rochelle (fondateur du label Linoleum) s’associe à nouveau au pianiste Marc Sarrazy pour ce nouvel album Cyclotimic Songs. Un projet entre musique et cinéma arborant le célèbre personnage créé par Pierre Souvestre et Marcel Allain, Fantomas, arborant Fantomas sur sa pochette ou en couverture. Oscillant entre jazz et pop, l’enregistrement regroupe 10 morceaux aux multiples facettes, à l’image de ce héros incarné à l’écran par Jean Marais. Rien d’étrange donc, dans la 6e piste, d’y croiser John Malkovich, avec qui j’ai fantasmé de pouvoir “changer de peau” dans ce film où le trouble de l’identité est aussi au cœur de l’intrigue (Talking to Malkovich). Installé au 7eme étage et demi, les images défilent devant nos yeux (ou ceux d’un autre) tandis que le marionnettiste Mike Ladd manipule les mots. Sur les notes de pianos, des plans, sans lien apparent, se succèdent : vues urbaines, scènes de plongée sous-marine, pluie d’étoiles filantes, le tout entrecoupé par des apparitions de John Malkovich. Et cette sensation que le projectionniste a découpé la pellicule pour tout réagencer à son envie. Un collage pictural qui a inspiré le duo pour ces nouvelles compositions (et d’autres avant eux : William Burroughs étant à l’origine du procédé du Cut Up). Fragmenter puis recomposer : brouiller nos repères… Une impression accrue par cette prose morcelée, alternant pamphlet et légende créole. C’est comme si nous suivions le rappeur au travers de cette ville, pointant du doigt ces travers : de la surconsommation made in Amazon (“They made this hell we built our selves in it“) au racisme lattant avec cette référence à la Madame Desbassayns, tristement célèbre sur l’île de la Réunion, passée du rang de Sainte à sorcière une fois l’esclavage aboli et ses horreurs dévoilées (“lets take this house and shake out unwelcome spirits”). Sarrazy Rochelle propose ici une musique hypnotique sublimée par le flow fascinant du poète américain. Julien
Retrouvez Sarrazy Rochelle sur Facebook
Crédit Photo Dorian Cruzdekeizer